MEIYO : L’honneur

Au Japon, les enfants sont élevés avec un sentiment aigu de l’honneur, leurs parents manifestent eux-mêmes un attachement plus grand à l’honneur qu’à la vie.

L’honneur, qualité essentielle, établit notre attitude et notre manière d’être vis-à-vis des autres.

C’est une intense conscience de la valeur de la dignité personnelle. Nul ne peut se prétendre Budoka (guerrier au sens noble du terme) s’il n’a pas une conduite honorable.

Du sens de l’honneur découlent toutes les autres vertus.

Il exige le respect du code moral et la poursuite d’un idéal, de manière à toujours avoir un comportement digne et respectable. Toute infraction à l’honneur d’un samouraï était ressentie et appelée «ren-shi-shin» (un sens de la honte).

La désobéissance au code ou à un supérieur produisait un sentiment de culpabilité et de honte. Le sens du déshonneur était ainsi le stimulant suprême pour corriger la conduite.

Un samouraï, dans sa jeunesse, refusa de laisser entamer sa réputation par une compromission légère parce que, disait-il, « le déshonneur est pareil à une cicatrice sur un arbre que le temps, au lieu d’effacer, agrandit tous les jours ».

Mais ce sens de l’honneur, s’il est mal compris, a donné lieu, chez les samouraïs, à des exagérations morbides. Ceux qui n’avaient sacrifié, par avance, que leur corps, mais cultivaient inconsciemment un égoïste amour d’eux-mêmes et un orgueil arrogant, croyaient, pour un oui ou un non, devoir laver dans le sang de pseudo atteintes à leur honneur.

Heureusement, chez les samouraïs, s’offenser d’une provocation légère était ridiculisé comme un manque de contrôle de soi.

Selon un dicton populaire ; Supporter ce qu’on croit ne pas pouvoir supporter voilà qui est réellement supporter. Meng-Tseu disait : « Il est dans la nature de tout homme d’aimer l’honneur, mais ce qui est vraiment honorable réside en chacun et non ailleurs. L’honneur que les hommes confèrent n’est pas le véritable honneur ».

L’approbation des hommes et la gloire du monde n’est pas l’honneur. Mais l’honneur est attaché à la manière d’être, à la fidélité, à la parole, à un ami, un Maître, un Idéal, ou à la vérité.

C’est pourquoi le devoir de fidélité est un des piliers du Bushido.

CHUJITSU : La fidélité

Il n’y a pas d’honneur sans fidélité et loyauté à l’égard de certains idéaux et de ceux qui les partagent.

La fidélité symbolise la nécessité incontournable de tenir ses promesses et remplir ses engagements.

La fidélité nécessite la sincérité dans ses paroles et dans ses actes. Le sentiment de fidélité a, dans le Bushido, une importance capitale.

De nos jours, ce lien a évolué, tout au moins dans certaines civilisations occidentales, mais il n’a pas pour autant disparu. Bien que, dans certains pays d’Occident, on prête encore maintenant serment au souverain, Roi ou Empereur, qui incarne la patrie. Aujourd’hui, il convient de faire preuve de fidélité et de loyauté, par exemple à l’égard de sa patrie, y compris, pour la défendre, l’éventuel sacrifice de la vie. Celui qui se dérobe à ce devoir est considéré comme un lâche ou un traître.

En Chine, Confucius faisait de la fidélité et la loyauté à l’égard des parents le premier des devoirs humains. Dans l’Inde, ces devoirs occupent une grande place. Au Japon également. Mais, dans l’Inde, la première place revient au Maître spirituel ; au Japon, elle revient à l’Empereur qui incarne pour les japonais le YAMATO, l’âme même du pays.

L’importance de ce message est que, quel que soit le motif ou l’objet de la fidélité et du loyalisme, ce sentiment existe.

Mais, toutes ces fidélités et loyautés, ont un dénominateur commun. C’est la consécration de sa vie à quelque chose de plus grand que soi, et que les possessions humaines ou matérielles.

Celui qui ne vit que pour soi ou ses possessions humaines ou matérielles, est un vivant de qualité médiocre, qui ne sauvera finalement aucune de ses possessions, ni même sa vie, puisque tôt ou tard il mourra.

De nos jours, les principes directeurs du Bushido restent toujours vrais, mais doivent être adaptés à des situations nouvelles.

Dans les Arts Martiaux, les relations de Maître à disciple sont le grand idéal humaniste traditionnel. Son application dans la vie tout entière offre un large champ de réalisation des principes du Bushido.

Il convient donc que les ceintures noires s’en inspirent, le respectent et le vivent.

SEIJITSU : La sincérité

Lors du salut d’un pratiquant d’art martial au début et à la fin des cours ou des compétitions, vous exprimez cette sincérité.

Le mensonge et l’ambiguïté engendrent la méfiance qui est la source de tous les désaccords. Dans les Arts Martiaux, le salut est l’expression de cette sincérité, c’est le signe de celui qui ne déguise ni ses sentiments, ni ses pensées, de celui qui veut être authentique.

L’honnêteté était une extension de la vision du courage que le bushi avait. Aussi s’efforçait-il de rester honnête dans toutes les situations.

Confucius va plus loin : « La sincérité est la fin et le commencement de toutes choses, sans la sincérité, rien n’existerait ».
L’idéogramme chinois qui signifie sincérité est une combinaison de « Parole » et de «Perfection ».

Le Bushido tient le mensonge ou l’équivoque pour une égale lâcheté. BUSHI NO ISHIGON, parole de samouraï, est une garantie suffisante. Une promesse ainsi faite est tenue, sans preuve nécessaire de cet engagement. Il n’y a pas de différence entre vérité et réalité.

Cependant il peut exister des préséances entre le vrai et le réel. C’est alors que doit intervenir le discernement. Si un malade demande à un médecin : « quelle est la gravité de mon état ? ». Le médecin en répondant : « ce n’est pas grave, vous serez bientôt guéri », bien qu’il sache le contraire, obéit à une vérité d’un ordre supérieur : préserver le moral, dont les chances minimes de guérison de son malade ; ne pas troubler et accabler inutilement son prochain et son entourage.

Il en est de même de la politesse. Parfois, dire la vérité est une cruauté inutile. Cacher une disgrâce, une laideur, une antipathie est un acte de compassion qui obéit à une réalité d’un ordre supérieur à la Vérité immédiate.

La passion du Bushido pour la franchise, la loyauté, a sa source dans le courage, mais aussi dans le besoin de limpidité, de pureté, d’harmonie et de cohérence.

Tout ce qui entache cet état est déshonorant.

KEN : La modestie et l’humilité

Les relations enseignant-élève sont impossibles sans modestie.

Si le budoka devient l’ambassadeur du code moral, il se doit de rester humble et ne pas flatter son ego.
L’orgueil et la vanité freinent considérablement l’apprentissage de ce code.
La bonté et la bienveillance ne peuvent s’exprimer sincèrement sans modération dans l’appréciation de soi-même.

Savoir être humble, exempt d’orgueil et de vanité, sans faux-semblant est le seul garant de la modestie.

Comme toutes les autres bases du Bushido, la modestie a ses véritables racines dans la sincérité et la vérité.

Une modestie, qui n’est qu’une forme purement extérieure de la politesse ou une habileté pour se concilier l’opinion, n’est pas la véritable modestie.
Une fausse modestie peut être une des formes les plus dangereuses de la vanité, ou de la peur: «Je me mettrai si bas, que nul ne pourra m’y mettre davantage », n’est rien d’autre que la formule d’un calcul bassement utilitaire.

L’homme vraiment modeste ne désire pas s’abaisser, mais simplement s’apprécier, selon la vérité et la justesse, avec sincérité et honnêteté. La vanité aime parader, même si elle proclame une valeur irréelle ou médiocre.

Le désir d’être admiré, aimé, respecté pour légitime qu’il soit, n’est admissible que si la valeur est authentique. Ce désir est à l’origine de bien des exploits et aussi de bien des erreurs.

Celui qui dit : « Je suis modeste », cesse de l’être à cet instant précis. Le culte de la modestie consiste donc, d’abord, à être conscient de l’immodestie et de la propension à affirmer, à soi-même et aux autres, des valeurs inexistantes. Il consiste, ensuite, à concentrer l’attention sur ce qui manque, objectivement, avec la ferme volonté de se transformer. Enfin, il est important de savoir apprécier, respecter et aimer la valeur chez les autres, amis ou ennemis, et les prendre pour référence.

On risque peu à peu de les surestimer, tout en les sous-estimant.